La seconde procédure nationale d’opposition (PNO) lancée par l’Inao au sujet de l’introduction de cépages rouges dans le cahier des charges de la clairette de Die vient de se terminer, le 9 mai exactement. Pour la seconde fois, les producteurs de cerdon – un effervescent rosé « méthode ancestrale » produit dans le Bugey – ont manifesté leur opposition au projet, au grand dam des producteurs de la clairette.
Suite à la première PNO, qui a eu lieu en avril 2015, ces derniers ont en effet accepté de prendre de nouvelles mesures, en fixant à 5 % minimum le taux de cépages rouges – gamay et muscat mutant – dans le vin. Les surfaces plantées étant très limitées dans le vignoble – moins de 10 ha – cela limitait la possibilité de production « massive » de clairette rosée, principale crainte des producteurs de cerdon. Les producteurs de clairette ont, par ailleurs, amené des éléments supplémentaires au dossier pour étayer le lien à l’origine, grâce à de nouvelles preuves historiques.
Mais cela n’a pas suffi à faire changer d’avis la quarantaine de producteurs de cerdon concernés qui ont décidé de faire à nouveau part de leur opposition, toujours avec les mêmes arguments. « Nous avons fait un pas, mais Cerdon ne désarme pas, se désole Fabien Lombard, président du syndicat de la clairette de Die. Ils veulent conserver leur monopole de méthode ancestrale rosée et nous accusent de concurrence déloyale car ils craignent une déstabilisation de leurs marchés. Or, la production ne devrait pas dépasser les 10 000 hl. Ils se trompent de cible et, en attendant, on perd du temps. »
Plus qu’une simple bataille commerciale, c’est en réalité un problème de fond portant sur l’évolution des AOC qui est soulevé par les deux parties. « Ne pas faire évoluer un cahier des charges en introduisant une nouvelle couleur est une vision un peu passéiste. Il y a un véritable décalage de vision entre nous ! », déclare Fabien Lombard. « Est-il normal que l’Inao autorise de produire n’importe où un produit qui fonctionne bien ailleurs, par la création d’une nouvelle couleur dans un nouveau cépage ? », interroge de son côté Éric Angelot, président du syndicat des vins du Bugey.
S’opposer à la clairette rosée est donc aussi pour lui une façon de mettre l’Inao « devant ses responsabilités » : « Je demande que l’Inao réaffirme sa position de fond, justifie-t-il. Il faut savoir ce que nous voulons faire, ce que l’on défend. Je souhaite qu’ils se positionnent clairement et qu’ils soient conscients de la porte qu’ils sont en train d’ouvrir. »
Le dossier est actuellement entre les mains de l’Inao. « Nous ignorons ce qu’il nous répondra », précise Éric Angelot. Du côté de Die, une réponse finale favorable est espérée lors du prochain comité national de septembre 2016, afin de pouvoir produire l’effervescent pour la prochaine récolte. S’ils obtenaient le feu vert de l’Inao, le président des vins du Bugey prévient qu’il « avisera, le moment venu, avec les autres vignerons, de la suite à donner ».